Façonnée par une histoire complexe l’architecture au Vietnam est aussi variée que sa diversité ethnique dont elle se nourrie. Au Vietnam, il n’y a pas un style mais des styles architecturaux pour le plus grand bonheur des voyageurs qui, du nord au sud, se plaisent à contempler ce patrimoine exceptionnel.
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L’architecture traditionnelle
L’architecture traditionnelle vietnamienne a été profondément influencée par les cultures chinoises au nord, cham au centre et khmère au sud, principalement pour les édifices religieux. C’est ainsi que les pagodes, conçues selon les principes de la géomancie afin d’être en harmonie avec l’environnement, intègrent de nombreux éléments chinois issus du confucianisme, du taoïsme et du bouddhisme mahayana. Suivant ces trois pensées, les palais, temples, tombeaux ou maisons communales sont l’expression d’un style architectural tout à fait unique en Asie du Sud-Est. La cité impériale de Hué classée à l’Unesco est le parfait exemple d’un ensemble de monuments largement inspirés de l’architecture chinoise mais en conformité avec la philosophie vietnamienne ancienne.
La pagode Bich Dong à Tam Coc, parfaitement intégrée à son environnement.
Au centre du Vietnam, le royaume de Champa de culture hindouiste, qui régna du IIème au XVIIème siècle, a laissé un formidable patrimoine archéologique et architectural. Le long du littoral du centre du Vietnam le voyageur peut admirer cet héritage notamment un nombre important de temples sanctuaires issus de la tradition du sud de l'Inde. Ces temples de brique rouge, de plan carré étaient pour l’époque de véritables prouesses architecturales, miniaturisation du mont Meru, montagne mythique considérée comme l'axe du monde dans la mythologie hindoue. Aujourd’hui, vous pouvez découvrir les vestiges de cette civilisation indianisée comme le sanctuaire de My Son, ancienne capitale religieuse et politique du royaume de Champa, ou les superbes tours cham de Po Nagar à Nha Trang, Po Klong Garai près de Phan Rang et celles de Po Shanu dans les environs de Mui Ne.
Les tours de l'architecture cham, typiques en briques.
Annexé en 1845 par le Vietnam, le delta du Mékong, situé à l’extrême sud du pays, est largement peuplé par l’ethnie khmère qui se considère comme les descendants des premiers occupants de la région. Leur présence est visible notamment à travers l’édification de pagodes bouddhistes de style theravada différent du bouddhiste vietnamien qui appartient au courant mahayana. Certaines édifiées depuis plusieurs siècles ont été reconnues comme des reliques nationales architecturales. Ces pagodes sont le fruit de l’extraordinaire créativité architecturale khmère comme la pagode Mahatup (pagode des chauves-souris) construite au XVIème siècle. Elle est sans nul doute la plus belle pagode d’art khmer du Delta du Mékong que l’on distingue par sa toiture dorée à deux niveaux et des bas-reliefs en forme de lotus.
La pagode Mahatup (pagode des chauves-souris), témoin de la présence historique des Khmers dans le delta du Mékong.
L’architecture coloniale
Au Vietnam comme dans les deux autres pays de l’Indochine française, le régime colonial a redessiné le paysage urbain des grandes villes. Larges boulevards, bâtiments de type européen puis indochinois, villas, églises…ont laissé leurs empreintes parfois indélébiles. C’est un patrimoine encore bien présent et susceptible d’intéresser les voyageurs passionnés d’histoire et d’architecture. Dans un premier temps l’administration coloniale a voulu montrer sa puissance dans la pierre avec une imposition stricte de l’architecture française. L’hôtel de ville à Saigon ou le palais du gouverneur à Hanoi, deux exemples de constructions au style classique purement français. Puis à partir de 1921, sous l’impulsion de l’architecte Ernest Hébrard, apparait le style indochinois, une osmose de l’architecture traditionnelle locale et du style occidental ou comment s’harmoniser avec l’environnement naturel et le mode de vie local. Le plus fameux édifice de cette inspiration est certainement l’ancien Musée Louis Finot de l’Ecole Française d’Extrême-Orient devenu aujourd’hui le Musée National d’histoire vietnamienne situé au cœur de la capitale vietnamienne Hanoï.
Hanoï possède encore un formidable patrimoine architectural colonial, Hô-Chi-Minh-Ville malgré son modernisme urbain galopant a conservé une belle collection de vestiges architecturaux coloniaux, quant à Dalat, l’ancienne station climatique créée par Paul Doumer et Alexandre Yersin, ses pinèdes cachent quelques belles demeures coloniales bien conservées dont certaines ont été transformées en de luxueux hôtels.
L'Opéra de Hanoi, petite réplique de l'Opéra Garnier de Paris.
L’architecture soviétique
Un certain nombre d’édifices inspirés de l’architecture soviétique néostalinienne témoignent de l’entente vietnamienne et soviétique pour l’accès à l’indépendance et pour la fin de la guerre du Vietnam. Le mausolée de Ho Chi Minh situé sur la célèbre place Ba Dinh à Hanoi en est l’exemple le plus flagrant. L’architecte russe Isakovitch qui le conçu s’inspira largement du mausolée de Lénine sur la place Rouge à Moscou. Ayant séjourné longtemps dans la capitale vietnamienne, cet architecte a laissé son empreinte dans le paysage urbain de Hanoï comme ces appartements collectifs, appelés khu táºp thá», appréciés par la classe populaire, ou l’Assemblée Nationale.
Le mausolée de Hô Chi Minh, inspiré du mausolée de Lénine à Moscou.
Bien que cet héritage soit beaucoup moins marqué à Hô-Chi-Minh-Ville, le Palais de la Réunification est l’exemple le plus spectaculaire de l’influence soviétique sur l’architecture contemporaine de l’ancienne Saïgon.
Architecture ethnique
Ce type d’architecture puise ses matériaux dans la généreuse nature: bois, bambou, palme, rotin, latanier, terre ou encore chaume de riz. L’architecture ethnique du Vietnam est riche et variée à l’image de sa diversité ethnographique. Sur pilotis ou à même le sol, longue ou en hauteur, murs en bois ou en pisé, toit végétal ou de tuiles, les habitations des minorités ethniques suivent également une architecture empreinte des rites et croyances propres à chacune d’elle car les génies et les ancêtres habitent également la maison. Séjourner chez l’habitant dans les zones montagneuses du nord du Vietnam vous permettra de connaitre et de comprendre toute la complexité architecturale ethnique. Sinon, la visite de l’excellent musée d’ethnographie de Hanoi et ses nombreuses maisons des ethnies du Vietnam est également une excellente opportunité pour observer ce type d’architecture originale.
La maison traditionnelle de M.Kinh et de Mme Thom à Ha Giang.
Hoi An, melting pot architectural
La charmante ville de Hoi An, classée au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, constitue un exemple exceptionnellement bien préservé d'une ville portuaire commerçante à l’urbanisme largement influencée par le mélange des cultures indigènes et étrangères (chinoises, japonaises et européennes). En vous baladant dans ses rues et ruelles vous pouvez admirer un superbe ensemble de bâtiments, à ossature de bois de jacquier et coiffés de tuiles dans le respect minutieux des équilibres entre ying et yang, mêlant les architectures chinoises et françaises, des pagodes d’inspirations chinoises ou un délicat pont japonais couvert en bois datant du XVIIIe siècle. Cette petite ville marchande du centre du Vietnam fait briller son passé, surtout les soirs de pleine de lune, lorsque les lanternes illuminent la cité, pour le plus grand bonheur des voyageurs.
La ville historique de Hoi An
L’architecture contemporaine
Et aujourd’hui ? Le Vietnam devient vertical pour le meilleur comme pour le pire. L’architecture moderne est « commerciale, support d’un marché immobilier bâti sur des images de pastiche, néo coloniales ou néo victoriennes, mélangées à un style asiatique incertain à l’image de l’architecture singapourienne » souligne Olivier Souquet, un architecte français installé à Hô-Chi-Minh-Ville. De cette anarchie architecturale se détache quelques belles conceptions modernes qui ont redessiné le paysage urbain de certaines des plus grandes villes du Vietnam. La tour financière Bitexco qui transperce le ciel de Hô-Chi-Minh-Ville est le parfait exemple de cette verticalité conquérante. Cocorico, ce sont des architectes français qui ont conçus cette tour en forme de lotus, symbole du Vietnam. Ses 68 étages dominent les anciens édifices administratifs de l’époque coloniale comme les douanes, l’ancienne banque d’Indochine ou le célèbre hôtel Majestic.
La tour Bitexco, symbole de l'architecture contemporaine du Vietnam.