Enfants Muong dans la province de Hoa Binh
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Origine et population des Muong
Les Muong s’établissent dans une région qui va de Nghia Lo (province Yen Bai) jusqu’au Thanh Hoa, en passant par les provinces de Phu Tho, Son La, Hoa Binh, Ninh Binh (entre les cours inférieur du Da – Rivière Noire – et supérieur du Ma), mais surtout à Hoa Binh. Ils descendent d’une communauté pré Viet-Muong dont ils devaient se détacher pour former une ethnie distincte vers les premiers siècles de notre ère. Alors que les ancêtres des Viet actuels gagnaient les plaines et subissaient l’influence de la culture chinoise, les anciens Muong sont restés dans les montagnes et évoluaient d’une manière relativement indépendante. Ils allaient cependant exercer une certaine influence sur l’ethnie Thai dont ils devaient bénéficier, en contrepartie, de différents éléments. Ainsi, les Muong sont proches des Viet par leurs origines et des Thai du point de vue social et culturel.
La famille Muong habite une maison sur pilotis dont l’architecture ressemble à quelques détails près à celle des ethnies voisines, surtout des Thai.
La tenue traditionnelle des Muong
Les hommes Muong s’habillent à peu près comme les Viet de la plaine, d’un pantalon et d’une veste de style pyjama. Par contre, le costume féminin tout en conservant une coupe traditionnelle s’agrémente souvent de notes particulières nées de quelque esprit inventif. Un turban et une courte veste blancs, une jupe noire, le tout souligné par une très large ceinture brodée de motifs multicolores qui enserre la taille et remonte très haut jusqu’à mi-poitrine. Les bijoux, bracelets et colliers d’argent assez simplement ouvragés, ne manquent cependant pas de charme. Pour toute coiffure, un carré d’étoffe blanche noué par derrière.
Les coutumes des Muong
Si dans la région riveraine du Da ou sur certains flancs de montagne, les Muong continuent la pratique des brûlis, ils cultivent le riz dans des champs irrigués à l’instar des Thai et avec le système Thai des canaux, rigoles et barrages. Jadis, le riz gluant était le plus souvent cultivé et les rizières ne donnaient qu’une seule récolte annuelle, mais de nos jours, on préfère le riz ordinaire en deux, voire trois campagnes par an. Dans certaines localités, le rendement atteint 5 tonnes par hectare. L’irrigation par norias est maintenant assez répandue.
Comme ils disposent de vastes régions, les Muong, en plus de la riziculture irriguée, cultivent par essartage riz, céréales, cucurbitacées, légumes, aménagent des forêts de plantes industrielles (bambou, cotonnier, chanvre, jute, bottelera diccoca), de véritables plantations d’arbres fruitiers et d’espèces médicinales dont la cannelle est la plus importante. La sylviculture constitue ainsi une source d’appoint appréciable de l’économie familiale. L’horticulture par contre n’a jamais été très pratiquée et tout au plus y consacre-t-on une petite portion de terre à proximité de la maison.
Le repas Muong se compose essentiellement de légumes sauvages, de pousses de bambou, de champignons, d’insectes, d’oiseaux, de gibiers, de poissons….
Les Muong laissent leur bétail en semi-liberté. Les animaux domestiques leurs servent de bêtes de trait dans l’agriculture et dans l’exploitation forestière, de « monnaie d’échange » avec plaine. Ils fournissent la viande des offrandes religieuses. La basse-cour est toujours très importante, peuplée surtout de porcs et de vollailes.
La chasse, pratiquée comme une distraction réservée aux hommes, vise avant tout à protéger les récoltes, et ses fruits servent seulement à améliorer l’ordinaire.
La pêche joue un rôle plus important que la chasse car en dehors du riz et des légumes indispensables, le poisson a la préférence des Muong. Les instruments de pêche sont très variés : filet, diverses variétés des nasses. On pêche toute l’année et la pratique en est connue de tous les Muong sans exception.
La cueillette des produits forestiers, champignons odoriférants, miel, rotin, bambou, plantes médicinales, alimente un courant d’échanges avec le delta et peut rapporter à chaque famille un supplément appréciable.
Les techniques étant encore peu élaborées, l’artisanat ne s’est pas détaché de l’activité agricole. Certains métiers artisanaux, céramique, travail du fer, orfèvrerie…sont inconnus chez les Muong, peut-être parce que déjà les Viet du delta leur livrent tout ce dont ils ont besoin. Le tissage, en particulier celui des tapisseries aux dessins géométriques multicolores, est assez important et fournit le tissu des vêtements, des couvertures…Très recherchée dans le commerce, la ceinture Muong est un véritable objet d’art avec ses beaux motifs de décor qui rappellent ceux de la culture Dong Son.
Vie familiale et sociale des Muong
Les Muong se groupent en villages ou hameaux, appelés parfois que ou quel, qui comprennent pour les petits de 3 à 5, et pour les grands quelques dizaines de foyers. Le territoire de chaque village et bien délimité et aménagé de façon rationnelle : terrains d’habitation entourés de montagnes et de forêts considérées comme propriété commune, champs, sources d’eau, cimetières. Les habitants n’appartiennent pas forcément à une même lignée patronymique de sorte que le village Muong représente ce qu’on appelle une communauté de voisinage.
Plusieurs villages forment un Muong, de 20 à 30 pour les grands comme Muong Bi, Muong Vang, Muong Thang, Muong Dong, Muong Lang Chanh, de 3 à 5 jours pour les plus petits. A la tête de chaque muong est un lang cun aidé d’un apparel administratif…Les muong sont en principe indépendants les uns des autres, mais la coutume veut que les petits muong respectent les grands. Un muong se trouve toujours sous la coupe d’une famille « «noble » dont on peut citer les Dinh, le Quach, le Bach, les Ha. Les membres de ces familles sont appelés tho lang ou quan lang. Le lang cun n’est autre que l’ainée de la branche ainée. Chef du muong, il ne gouverne en fait que le lang chieng, le hameau le plus grand et le plus riche en terre ; les plus petits étant confiés à ses cadets ou aux ainés des branches cadettes lang xom ou dao. Le coutumier muong donne aux tho lang le droit de gérer et de répartir les terres communales, de lever les corvées et de recevoir un tribut. Chaque famille lang possède ses tambours et ses vasques de bronze, symboles de son autorité. Elle mène une vie particulière à l’écart et fixe elle-même des règlements rigoureux pour défendre ses privilèges. Si le chef d’un muong meurt sans héritier mâle, sa place est – et doit être- offerte à un lang d’une autre lignée. A la veille de la révolution d’août 1945, le système des lang dao était en déclin, les rivalités entre différentes lignées de lang sont intervenues de plus en plus aigués, accompagnées de fréquentes effusions de sang.
Dans l’échelle sociale, à l’opposé de la classe des lang croupit la masse populaire à tel point que tous les gens du peuple sont désignés par le même nom Bui. Ces gens reçoivent chacun une portion de terre communale, mais doivent en contrepartie, contribuer aux soi-disant frais d’administration du Muong ou du hameau, en fait offrir un tribut au lang, corvées, offrandes de produits naturels, de denrées alimentaires ou d’objets précieux. Les Muong des hameaux pauvres qui vivent sur une pauvre agriculture par essartage sont considérés comme des immigrés (rua roong), condition qui ressemble à celle des cuong nhoc (serviteurs) chez les Thai. Contre le droit d’habiter le hameau et le défricher, ils sont assujettis à un dur système de corvées le plus souvent au profit des lang chez qui les plus pauvres servent comme domestiques.
Par contre, un très petit nombre des gens bien qu’issus de la classe paysanne, sont enrôlés dans l’appareil administratif des lang, appelés au et bénéficient de la confiance des lang et transmettent leur charge de père en fils par voie héréditaire.
Le système des xau, no, corvées levées par les lang à leur propre profit mérite une attention particulière. Chaque année, toute la population d’un muong doit cultiver en commun un lopin de terre déterminé, une corvée collective appelée xau, de faible rendement certes, qui sert surtout à concrétiser l’autorité des lang. Parallèlement, les habitants se partagent le travail (no) pour cultiver les rizières appartenant au lang, assurant la totalité des tâches, depuis les labours jusqu’à la récolte.
La famille Muong revêt un caractère nettement patriarcal, le père exerçant son autorité sur tous les membres de sa petite famille.
Que les parents meurent sans héritier mâle et le patrimoine familial revient de droit aux seigneurs même s’il y a encore dans la famille une ou plusieurs filles vivantes. C’est la coutume thu lut. Les jeunes filles ne choisissent pas leur mari mais « s’assoient là où les placent leurs parents ». Chez le peuple, la femme joue un certain rôle dans la famille, étant admise à discuter avec son mari des affaires communes.
Vie spirituelle des Muong
Pour cimenter cette société et maintenir l’ordre, chaque muong entretient le culte du Génie du Muong, chaque hameau celui du Génie tutélaire, un ancêtre du lang ou la personne qui avait défriché les terrains, fondé le Muong ou le hameau. Le culte des ancêtres est pratiqué en famille.
Par ailleurs, le culte du Génie du sol est assez répandu, en particulier celui du Génie du mont Tan Vien (plus connu sous le nom du mont Ba Vi).
Les Muong disposent d’une riche littérature populaire, De nombreux poèmes et récits versifiés ont été recueillis et publiés, entre autres La Nga-Hai Moi ; Nang Om chang bong Huong, Vuon hoa-nui Coi ; Dang van va… Certains relatent des histoires d’amour et condamnent la coutume ancienne des mariages arrangés par les parents souvent contre le gré de la jeune fille.
Les chansons folkloriques Muong glorifient le travail, les belles coutumes, ou expriment les sentiments de la jeunesse. Le vi dum, sorte de dialogue chanté en vers de 6-8 pieds alternés, est très populaire.
A noter en particulier le xac bua, chanté lors des fêtes, des noces…De cinq à vingt chanteurs formant un groupe appelé phuong bua, vong d’une maison à l’autre muni chacun d’un gong. Chaque fois qu’on cesse de chanter, on fait résonner le gong, paroles et musique alternant suivant un rythme approprié à chaque chanson.
Les contes et légendes Muong sont aussi nombreux que riches en contenu.
Les chants cérémoniels Muong, connus sous le nom de mo son récités par des thay mo lors des funérailles, des séances médiumniques, des sacrifices aux esprits… Dépouillés de leur gangue de superstitions, ils apparaissent comme des récits historiques ou littéraires, où se reflètent la vie réelle et les aspirations de la masse laborieuse. Le mo intitulé La naissance de la Terre et de l’Eau sur les conceptions cosmogoniques muong ainsi que les mo sur les tambours de bronze, sur les us et coutumes… constituent des mines de renseignements pour les chercheurs.
Les Muong se joignent depuis toujours au Viet dans l’édification et la défense nationale. A différentes époques historiques, le pays Muong avait servi de base de résistance à des héros nationaux comme Le Dai Hanh, Le Loi, et d’autres chefs d’ascendance locale. Il contribuait aux efforts de résistance en hommes et en biens et nombreux sont ses fils qui se sont distingués au front.
Source : DANG Nghiem Van, CHU Thai Son et LUU Hung, Ethnies minoritaires du Vietnam, 2010, The Gioi, Hanoi.
Dans quelles régions peut-on rencontrer les Muong ?
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